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Le pays imaginaire de Defy
25 novembre 2005

27 avril 2004 – La tuile

Hier, nous avons fait les derniers approvisionnements en produits frais à Panamá City. C’est une ville de contraste. L’architecture vieillotte et en déliquescence du centre ville se heurte au nouveau quartier des affaires, constitué de building et de gratte-ciels à l’américaine. Ici, une richesse ostentatoire côtoie la misère la plus profonde. Ce qui me frappe, c’est que dans ce pays, même les plus pauvres gardent le sourire. À l’issue de mon voyage, je serais convaincue que la France est le pays qui rassemble de plus de râleurs aigris au mètre carré ! La moiteur rend la chaleur difficilement supportable. J’ai l’impression de me transformer en post-it vivant. Du reste, mon pli nasogénien a pris une délicieuse teinte rougeâtre, voir jaunasse. En plus, c’est douloureux. Je désinfecte mon piercing quatre fois par jour, mais il semble que le docteur Robert ait eu raison. Les tropiques, c’est un nid à staphylocoques. Comme je suis têtue, je ne veux pas le retirer. Je me suis servi comme jamais de mes quelques notions d’espagnol. Quel dommage d’avoir eut une prof Franquiste au collège et au lycée. Si j’avais su que j’aurais un jour à acheter du kerdane pour une lampe à pétrole dans une ville d’Amérique latine, j’aurais peut-être écouté les cours avec discipline au lieu de jouer les Ché Gevara en herbe. J’ai trouvé un supermarché en tous points semblable au BHV. Sur quatre étages, on y vend aussi bien du dentifrice que de la viande ou des balais-brosses. Je m’y suis perdue pendant des heures, explorant chaque allée, inspectant les produits inconnus au packaging étrange, déchiffrant les notices. J’ai cherché du beurre - buro - en vain. Ici, on ne trouve que de la margarine. Pourquoi ? Mystère. Les Cybers Café fleurissent, concentrés dans la rue principale. Ils sont fréquentés par une population jeune qui semble venir y jouer aux jeux en réseau, mais aussi faire des recherches ou taper des devoirs. Le prix est plus que modique, quasi insignifiant. Dès la tombée de la nuit, Panamá City a pris des airs troubles et inquiétants. Une violence potentielle se dégageait des rues désertées. L’inconscient signal d’alarme s’est déclenché. Il était temps de rentrer. Quel que soit le lieu, l’heure ou l’être humain, j’ai toujours écouté cette petite voix, et je n’ai jamais eu à m’en plaindre. Là, le signal était fort alors qu’il était à peine 18 heures. J’ai sauté dans un taxi. Retour au bateau.
panama_city_2 Au « bar » du « yacht club » de Balboa, j’ai rencontré des Finlandais qui devaient traverser le canal dans l’autre sens. Ça tombait plutôt bien : on avait toujours nos vieux pneus dont il fallait qu’on se débarrasse. Il y avait bien un Charlie qui nous proposait de nous les reprendre moyennant le paiement d’un dollar pièce, mais on a beau être pour le petit commerce, c’était une arnaque trop grossière pour être tolérable. C’est pas grand-chose pour nous de marcher dans les combines et ça permets aux Charlies de prospérer, mais le sentiment d’être pris pour un pigeon est également assez désagréable. J’ai retrouvé Charlie à l’embarcadère des annexes, lui ai fait savoir que ces Finlandais là prenaient nos pneus, mais que s’il souhaitait les aider à les transférer d’un bord à l’autre, ils rémunèreraient ses services. La cause était entendue. Après le transfert des pneus, je nous ai cuisiné des steaks avec des oignons confits déglacés au vinaigre balsamique. La viande Chilienne est décidément la meilleure du monde. Xavier avait raison, on pourrait la couper à la petite cuillère tant elle est tendre. Le lendemain, dès l’aube, nous appareillons pour les îles Las Perlas que nous comptons visiter avant de mettre le cap sur les Galápagos. Il n’y a que 24 heures de nav. Nous franchissons déjà la dernière bouée latérale du chenal. À la barre, je sens Aramis heureux de se dégourdir les jambes. Nous voilà dans le Pacifique pour de vrai. Il ne nous reste plus qu’à traverser la zone d’attente des tankers et… à nous les embruns. Il me semble que déjà le ciel s’éclaircit. La chape de pollution est derrière nous et à chaque minute, le sentiment de délivrance s’amplifie. On va pouvoir envoyer la toile, couper le moteur… Tiens, le moteur justement. A pu de moteur. Il s’est éteint brusquement, d’un coup, sans aucun signe avant-coureur. C’est la panne ! La surprise est totale. Heureusement, nous ne sommes à proximité d’aucun cargo. Les hommes s’affairent à l’intérieur, démonte la descente et accèdent au vilain Volvo. Qu’est-ce que c’est que ce bordel ! Michel jure plusieurs fois en Alsacien. La situation est grave, on croirait l’entendre parler à l’ordinateur, il est très contrarié. Or, c’est un homme qui n’aime pas que les choses (et les gens, mais ça je l’apprendrais plus tard) lui résistent. J’ai pris un repère à terre et constate que nous dérivons assez rapidement vers le chenal – zone de circulation des tankers, et c’est ni très manoeuvrant ni très amical un porte-containers. Il faut qu’on se dégage de là vite fait. Heureusement, nous bénéficions d’une toute petite brise. J’appelle Raymond à la rescousse et nous hissons rapidement la grand-voile et déroulons le génois. Péniblement, Aramis étale le courant. Je repère sur la carte une zone de haut fond excentrée et fait route. Dès que le sondeur indique quinze mètres de profondeur, nous ancrons. remorqueMichel et Patrick ont émis un premier diagnostique. Il s’agit probablement de l’inverseur. Impossible de réparer. Il faut rentrer et trouver un mécano. Dans notre malheur, nous avons la chance de réussir à attirer l’attention d’un pêchou qui nous remorquera jusqu’à la plus proche marina. Mais nous ne pouvons y entrer, elle est pleine. Nous sommes cantonnés à l’extérieur et ancrons à l’Ouest de la marina. Ce soir-là, pour consoler l’équipage, je mets le disque du chanteur Italien que m’a gravé Bruno et je nous prépare des pastas avec une sauce tomates, artichauts et ail. Pour l’apéro, je fais frire des bananes plantains et confectionne avec amour de grands verres de planteur sans oublier d’y ajouter ma magic touch : cannelle et Tabasco. On se détend. Au dessert, je craque et j’allume une cigarette. Nico, tu avais raison de me dire d’emmener ce paquet d’urgence pour les coups durs ! Il en reste dix-neuf. Clin d’œil à Seb : je vais lire Alan Carr !

Panamá City, 8° 58 N - 79° 32 W

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Commentaires
A
Bien sûr, c'est moi Tonio, ton amoureux.
A
Là y'a des raviolis qui m'attendent et qui vont être trop cuits si je lis.<br /> (Et si ça se trouve tu risques de m'en vouloir).<br /> <br /> Almost Tonio
Le pays imaginaire de Defy
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